L'Angle Mort
Réponse à Jean Collet
Ma main tremble un peu à l’idée de répondre au savant qu’est Jean Collet. Qui a su me faire découvrir des chefs d'oeuvres à côté desquels je serais passé (Prova d'orchestra de Fellini) Avec qui je me suis réjoui d'un magnifique premier film (Petits arrangements avec les morts de Pascale Ferran). Un maître en cinéma dont les critiques m’ont souvent éclairé. Mais là, non.
Il commet d’étonnantes erreurs d’observation. A-t-il vu le film en entier ?
Il invente lui-même les torts de celui qu’il veut éliminer.
La réalité du film.
Selon Jean Collet, Haneke « dénonce des êtres qu’on n’aurait pas la moindre envie de fréquenter à la sortie de la salle », son film pourrait s’intituler « tous pourris » ! Eh bien, moi, j’aimerais bien fréquenter l’instituteur pas très brillant mais attaché à un calme discernement qui lui permet de tenir tête aux donneurs de leçons ; ainsi qu’Eva, si rayonnante de sincérité. Ils constituent un couple porteur d’espérance, Et puis le père d’Eva qui pose une loi équilibrée et saine me parait très fréquentable. Il y a aussi plusieurs femmes qui, de manière moins emblématique, plus réaliste, assument leur rôle du mieux qu’elles peuvent dans la culture de leur époque : la baronne, Mme Wagner et même la femme du pasteur qui apporte discrètement un peu de douceur au rigorisme imposé par son mari. Quant aux deux petits derniers du médecin et du pasteur ils sont là pour rappeler justement la bonté spontanée des enfants. Une petite dizaine de personnages qu’on ne peut guère traiter de « pourris » !
Jean Collet dénonce la « prétention à tout expliquer » et « l’importance du message qu’il veut nous transmettre. » Or, l’expression la plus fréquemment entendu, celle-là même de la voix off qui ouvre le film est « je ne sais pas ». Ce film n’illustre pas de message et n’explique pas. Il ne manipule pas le spectateur. En revanche il nous implique. Ce que Jean Collet dénonce comme « l’effet » c’est la prise en compte de la réception dans l’œuvre comme en faisant partie. Haneke évite la séduction : absence de musique d’accompagnement et permanence de la voix off instaurent une distance où le spectateur peut exercer librement son jugement. Il refuse la fascination en occultant la pire violence.
Nos réceptions différentes montrent que s’il y avait « un message » (à la manière des tracts filmés de Michael Moore), il serait pour le moins peu clair.
« Tout est beau sur l’écran » écrit Jean Collet : ce serait un « moyen de faire passer ce message » ? Il faudrait donc ne pas regarder l’écran ?! Alors, comment y trouver du sens ?! La construction et la qualité plastique des images concourent ici à lisser les apparences, comme toute bonne esthétique bourgeoise, bien propre. Cette beauté froide contribue à mettre en place une esthétique paradoxale et riche : à la fois de distanciation et d’un charme discret.
Non, pas de fascination pour le mal dans ce film, seulement la quête un peu vaine de ce qu’on sait inexplicable : le mystère du mal ; et le désir de le vaincre, modestement, avec réflexion et amour comme l’indique le pivot du film qu’est l’instituteur.
Observer attentivement un film, avec un maximum d’objectivité, avant tout jugement critique, me parait la première règle d’une approche chrétienne respectueuse du 7ème art. Ce qui préserve des jugements d’autorité et permet d’éduquer le regard.
Cela dit, il n’est pas non plus question de crier au chef d’œuvre ! Il y a dans cette esthétique quelque chose d’appliqué, de trop « précautionneux » que quelques moments de grâce viennent souligner par contraste : la sortie en charrette et les timides gestes amoureux qu’échangent Eva et l’instituteur ; les ambiances de fête et les paysages ouverts sur le ciel. Mais l’ensemble manque de souffle ! Donc d’esprit.
Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage,
Ce qui gêne, c’est que Jean Collet invente la thèse qu’il veut combattre à partir d’autres films que « Le ruban blanc ». Jean Collet veut voir « un plaidoyer contre le retour à un passé éducatif suranné » ce qui lui permet de fustiger le laxisme « post-soixante-huitard », la démission ou l’absence des parents, etc. A cet égard, Le Ruban blanc est un film anachronique » écrit-il. Que le film de Haneke souligne les dérives du rigorisme et du puritanisme protestants est indéniable. Mais ça ne me parait pas déplacé aujourd’hui. Nos Eglises peuvent encore céder aux charmes du confort doctrinal, des restaurations réactionnaires et des intégrismes moralisateurs.
La théorie des grands auteurs intouchables
Mais je voudrais élargir un instant ma réponse aux repères qui permettent à Jean Collet d’être aussi virulent. Sur quels indices appuie-t-il sa critique ? Sur sa culture, immense. Sur l’histoire du cinéma et un Panthéon de proclamés « grands maîtres ». Sa critique croule sous les références.
Certes, il faut aider les spectateurs à comprendre que le cinéma n’est pas né à Hollywood à la fin du siècle dernier. Mais la théorie des grands auteurs intouchables risque d’aveugler et de repousser un minimum d’exigences précises à l’égard des films récents. Si pour apprécier un film il faut vénérer tout Ford, tout Dreyer, tout Hitchcock et tout Bergman (en évitant le cinéma asiatique ?), je renonce. D’autant qu’aucun réalisateur ne crée que des chefs d’œuvre ; et que quelques merveilles viennent parfois éclairer de très moyennes filmographies. Du même auteur, j’avais détesté « La pianiste » mais j’apprécie « 71 fragments d’une chronologie du hasard » et « Caché ».
Pourquoi enfermer Haneke dans des références qui probablement ne sont pas les siennes ? Il a su éviter le piège de la citation. Après tout, qu’il évoque à quelques cinéphiles certaines ambiances d’un chef d’œuvre comme Ordet ne me déplait pas. Si elle l’enrichit, la référence n’est pas nécessaire à la réception du film.
La théorie des grands auteurs a eu un rôle important, tant en cinéma que dans les arts plastiques (Père Couturier). Il me semble qu’érigée en dogme, elle laisse désormais apparaître ses limites. Elle tend trop à valoriser de l’extérieur chaque production du « maître » et réserve la compréhension des films à une élite très cultivée, Surtout elle passe à côté d’un jeune cinéma d’Amérique latine et d’Asie, et de la recherche sur les images en mouvement (vidéo, cinéma expérimental, documentaire…) à la rencontre de l’art contemporain, en pleine effervescence.
Décidément il me plaît bien cet instituteur/narrateur du « Ruban blanc », qui prend le temps d’un véritable discernement à partir de ce qu’il voit, sans dogme, avec simplicité et un brin de naïveté. Avec la tendresse et l’humilité qui qualifient, selon Jean Collet, « la justesse du regard ». Et là, il a raison.
Michel Brière
Palme d’or à Cannes, critique enthousiaste et quasi unanime. Comment ne pas admirer le dernier film de Haneke ? Tout y est réuni pour constituer un chef d’œuvre : les images d’abord, le retour à la photo en noir et blanc qui rappelle aussitôt les grands films classiques, la douceur d’un album de famille, le passé transfiguré, sublimé. La mise en scène ensuite, ses longs plans fixes, parfaitement cadrés, mais aussi bien la caméra mobile dont on ne sent jamais la présence parce qu’elle est discrète et nécessaire. Elle est là pour faire voir, et non pour se faire remarquer… Présence impressionnante et majestueuse des acteurs, quel que soit leur âge. Comment ne pas penser à Dreyer, à la peinture flamande ?
Et puis enfin un grand sujet : la violence. On sait que Haneke lui a consacré jusqu’ici toute son œuvre, on se souvient de Funny Game, La Pianiste, Caché … Mais – ô surprise – avec ce Ruban blanc, et à l’image de son titre, Haneke renonce à la violence visible. C’est même l’introuvable violence qui motive le suspense de son film. Violence sournoise que le spectateur attend, recherche parce qu’il n’en voit que les effets (on pense à Bresson). Comment ne pas admirer l’habileté d’un tel parti-pris, comment ne pas reconnaitre une stupéfiante conversion dans la carrière du cinéaste ?
Et pourtant je n’arrive pas à entrer dans ce film, même si le malaise qu’il procure n’a rien de commun avec l’horreur insoutenable que Funny Game nous forçait à éprouver, à moins de quitter la salle (ce que je n’avais pas pu m’empêcher de faire dix minutes avant la fin du film). « Habileté », j’ai dit ce mot tout à l’heure et je n’en trouve pas d’autre pour expliquer ce que je ressens. Mais pourquoi cette impression, d’où vient elle ? Bien sûr, tout est beau sur l’écran, bien sûr Haneke traite un grand sujet et je ne doute pas de sa sincérité, il est surement convaincu de l’importance du message qu’il veut nous transmettre. Convaincu aussi d’avoir trouvé les meilleurs moyens de faire passer ce message, il a voulu construire un film efficace, et il a sûrement réussi. Au moins jusqu’ici auprès du jury de Cannes et de la critique.
Quel est donc ce message qui fait l’unanimité ? Le Ruban blanc, en effet, ne dérangera personne, et cela même devrait jeter quelque trouble, paraître un peu suspect. Quelle est donc cette origine du Mal que Haneke aurait le mérite d’avoir découverte, et le courage ( ?) de dénoncer. Si j’ai bien compris, Le Ruban blanc – image de l’innocence, de la pureté des enfants – ce n’est pas tout à fait l’enfance que l’Evangile nous invite à retrouver ; bien au contraire, c’est l’enfance pervertie par la violence des contraintes, des sévices que la rigueur et l’hypocrisie des adultes lui fait subir. C’est le puritanisme d’une « éducation » qui a certainement existé il y a cent ans ; et en particulier sans doute dans ces villages fermés où des hobereaux privilégiés et arrogants semblaient ignorer l’existence de la démocratie. Comme d’ailleurs ils feignaient de n’avoir jamais entendu la voix d’un certain Jésus de Nazareth – et la colère de Jésus – quand il s’adressait aux pharisiens. A ceux précisément qui méritent de se voir « engloutis en pleine mer avec une meule autour du cou » pour avoir scandalisé un enfant. (Matthieu , 18, 5-12). Haneke se prendrait-il pour un nouveau Bernanos en cherchant du côté des « enfants humiliés » d’hier, l’explication des violences d’aujourd’hui ?
Rien de commun pourtant, entre l’auteur du Journal d’un curé de campagne et celui de Funny Games ! … Tout les sépare ; ne serait-ce que l’humilité de Bernanos à travers son œuvre, et la prétention permanente de Haneke. Prétention à tout expliquer (ce qui n’a jamais été un trait des grands artistes), mais surtout prétention à dominer, à violenter, à maîtriser – au pire sens du terme – le spectateur. Car il y a une constante dans le cinéma de Haneke, malgré ce qui sépare son dernier film des précédents – et quoiqu’il s’en défende – c’est la fascination du mal que ce cinéaste tient absolument à nous faire partager. Soi-disant pour notre bien. Mais, que le remède soit d’un goût à vomir (Funny Games, La Pianiste), ou excessivement raffiné (Le Ruban blanc), le cinéaste se veut guérisseur à tout prix ; et je me méfie des bonnes intentions dont l’enfer est pavé.
A la réflexion, j’ai bien du mal à prendre au sérieux la pharmacopée de ce clown, trop blanc et si ténébreux, qui éprouve le besoin régulier de se déguiser en docteur Freud. Si la thèse – tellement simplette – du Ruban blanc peut à la rigueur coller plus ou moins bien avec la montée du nazisme, elle n’a aucun intérêt pour nous aujourd’hui. D’abord parce que Fritz Lang a fait la lumière là-dessus – et quelle lumière et quel esprit – quand il fallait le faire, et quand il fallait du courage pour le faire. Et puis, Lang ne s’est jamais pris pour un prophète, tout simplement parce qu’il l’était.
Ensuite, parce que la violence présente, omniprésente désormais dans le monde ne saurait s’expliquer par les méfaits d’une éducation trop rigoriste sur les générations montantes (c’est plutôt le contraire qui saute aux yeux : le laxisme « post-soixante-huitard », la démission ou l’absence des parents, etc …). A cet égard, Le Ruban blanc est un film anachronique ; c’est sans doute ce qui fait son charme et justifie son succès.
Oublions donc la thèse et le donneur de leçons. Reste la beauté du film, n’est ce pas ? Oui, mais quelle beauté ? Peut-on féliciter Haneke de l’application laborieuse avec laquelle il fait du sous-Bergman, du sous-Dreyer ? Car il ne s’agit pas de créer en copiant, il copie pour avoir l’air de créer. Cela s’appelle l’académisme, cet ersatz de l’art, ce Canada-Dry du cinéma, ce piège tendu au critique, au spectateur … et aux jurés des festivals (qui s’en tirent parfois comme cette année en couronnant en même temps le film le plus académique, celui de Haneke, et le plus « contemporain », celui de Audiard (Un prophète), dont on peut parier sans risque : ils vieilliront aussi mal l’un que l’autre. Et pour les mêmes raisons. Car Audiard comme Haneke ne regardent pas vraiment leurs personnages, ils regardent l’effet que leurs images vont produire sur le spectateur. La voila l’habileté, qu’on ne peut pas confondre avec la justesse du regard. Celle-ci ne va jamais sans la tendresse et l’humilité.
A ce propos, un dernier point rapproche encore ces deux films : le mépris (des personnages évidemment). Chacun dans son genre se complait à « dénoncer » des êtres qu’on n’aurait pas la moindre envie de fréquenter à la sortie de la salle. L’un et l’autre pourraient s’intituler : « tous pourris » ! On sait bien en entendant ces deux mots : la seule vérité qu’ils révèlent, c’est le mépris qu’on éprouve envers soi-même. Ni la barbarie d’Un prophète, ni l’esthétisme du Ruban blanc ne pourront dissimuler longtemps cette sombre évidence. Dieu nous garde des faux prophètes !
Jean Collet, novembre 2009
Jean Collet, né en 1932, professeur honoraire des Universités, journaliste à Télérama (1959-1971) et aux Cahiers du Cinéma (1961-1968), a enseigné le cinéma et la communication. En 1963, on lui doit le premier livre sur Jean-Luc Godard, plusieurs fois réédité et traduit en de nombreuses langues. Critique de films à la revue Études depuis 1965, il collabore au département "Fictions" de Arte, et poursuit son enseignement du cinéma au Centre Sèvres (Université des Jésuites à Paris). Il a aussi écrit sur François Truffaut, Federico Fellini, et une quinzaine d'articles dans l'Encyclopaedia Universalis (Hitchcock, Lubitsch, Bergman, Bresson, Bunuel, etc.)
Voilà. Chacun de son côté, nous avons vu Le ruban blanc dans la perspective d’en parler ensemble, d’enrichir notre réception du film et de porter un regard éclairé par la parole de Dieu et la foi.
1) Ensemble, dans un premier temps nous avons écouté ce que chacun avait remarqué et retenu :
- L’usage du noir et blanc, avec des ambiances nocturnes, des intérieurs très noirs et très contrastés : pièce lumineuse aperçue d’une autre dans le noir, flammes dans la nuit… Les extérieurs paraissent en revanche très lumineux, probablement surexposés : blondeur des blés, blancheur de la neige, vastes ciels...
- Pas de musique ajoutée à celle dont l’origine est visible : piano, harmonium, chant choral...
- Tout le film est accompagné d’une voix off ; c'est un récit de l'instituteur âgé, ce qui en fait le personnage principal. On peut supposer qu’il représente l’auteur.
- Répétition fréquente et peut-être premiers mots du film : "je ne sais pas." Nombreux dialogues bloqués.
- A part l’ellipse finale, une année passe, de juillet à juillet, scandée par les fêtes des moissons, de Noël; du nouvel an, de Pâques et de Pentecôte avec la Confirmation.
- Les paysages contribuent à la perception des saisons et accentuent, par contraste, la clôture du village.
- Ce village nommé Eichwald, parait quasiment féodal, avec ses notables : baron, pasteur, instituteur, et médecin. L’autre lieu nommé c’est Sarajevo. Le village se trouve confronté au monde d’un coup par l’assassinat de l'Archiduc François-Ferdinand à Sarajevo, le 28 juin 1914.
- Cadrages rigoureux, parfois centrés, stables. Nombreux plans fixes. Quelques panoramiques aller retour.
- Horizontalité ; très peu de plongées ou contre plongées, quelques rares travelings.
- Quantité d'enfants identifiés : Sigi fils du baron, Karli l’enfant trisomique, fils de Mme Wagner, Klara et Martin, leurs deux frères et deux sœurs, enfants du pasteur, Erna et Rudi, enfants du médecin, ceux du régisseur et ceux du fermier, le reste de la chorale...
- Les sentiments exprimés par l'instituteur et Eva - Principaux personnages positifs ; ils ne sont pas du village - leur pudeur confiante, leurs gestes tendres, leur naïveté, contrastent avec la froideur et la négation des sentiments dans les familles du village.
- Un instant d’émotion du pasteur quand son petit dernier lui donne son oiseau "pour remplacer Pipsi". Avec Rudi, le petit dernier du médecin, il sont deux autres personnages positifs.
- Plusieurs fois des portes jouent leur rôle paradoxal : elles cachent mais le son et/ou l’image suivante suggèrent violence, inceste, torture ce qui sollicite notre désir de voir, et notre imaginaire.
- En revanche la violence, la cruauté des propos du médecin à la sage-femme et du pasteur à sa fille sont sans retenue.
- Un indice clair de la tacite omerta familiale : le pasteur voit l'oiseau « crucifié » par Klara, sa fille. Il sait donc que le mal frappe à l'intérieur même de sa maison et nous savons, dès lors, qu’il le cache.
2) Ces remarques débouchent sur un débat :
- Le but d'un film c'est de prendre du plaisir, là, c’est trop hermétique, rien n’est expliqué. Un peu trop compliqué. Mais n’y a-t-il pas du plaisir à chercher, à participer au sens d’une œuvre, à ne pas se faire matraquer par un message ? Même un dessin animé comme Fantasia de Walt Disney n'est pas simple. Et, là, ça invite à une réflexion. Ce que désignent nos trois premières remarques (noir et blanc, pas de musique, voix off) ainsi que la fin ouverte tendent à distancier l’illusion et à maintenir le spectateur hors fascination.
- Il y a des moments, on est touchés, mais globalement, où veut-il en venir ? A l’origine et à la transmission de la violence et du mal.
- Le mal est efficace, diabolique, parce qu’il s’insinue. Comme pour la chute du médecin à cheval, sa cause, le câble tendu, demeure invisible. On n’en aperçoit seulement la trace.
- Ce village, il ressemble encore aux villages d’aujourd’hui. Tout est caché, il y a des lois terribles. Oui, faut pas croire, dans les villages c'est comme ça. C’est un village emblématique.
- C’est aussi le film qui est très maîtrisé. Trop maîtrisé. C’est peut-être nécessaire au sujet, cloisonnement enfermement, mais du coup ça manque de grâce et de souffle.
- Mais l’instituteur, personnage réfléchi et tendre, libre et respectueux, ose tenir tête et affronter. En s’identifiant à cet honnête homme, humaniste, on est invité à ne pas renoncer à enquêter devant les énigmes. Figure d’une possible quête devant le Mystère inaccessible.
- Beauté des images, à la fois austères, structurées et nuancées, parfois somptueuses (les fêtes). Elles manifestent et transmettent bien plus que les paroles.
3) Qu’est-ce que la Bible peut éclairer de ce film ?
Le mal ne s'explique pas, il survient. En Gn.3 apparaît une anomalie : un serpent, le plus rusé des animaux. Il parle, alors que seuls Dieu, l’homme et la femme parlent. Et il ment.
La tentation passe principalement par le regard, la vision : la femme vit que l'arbre était bon à manger et séduisant à voir, et désirable pour acquérir le discernement.
L’interdit posé par Dieu ne concerne que les fruits d’un seul arbre alors que le serpent veut faire croire qu’il porte sur tous les arbres. On pense, dans le film, à la multiplication des interdits chez le pasteur comparée à l’interdit raisonnable et structurant posé par le père d’Eva : attendre une année avant le mariage.. Peut-être n’est-ce pas un hasard si sa fille, jeune et rayonnante, s’appelle Eve ?
Dans les évangiles Jésus dénonce une loi pesante qui ne serait pas au service de l’homme «Le sabbat a été fait pour l'homme, et non l'homme pour le sabbat. » Mc.2,27.
Inlassablement, Jésus reprend les pharisiens qui accablent ceux qu’ils veulent guider : « Ils lient de pesants fardeaux et les imposent aux épaules des gens, mais eux-mêmes se refusent à les remuer du doigt. » Mt.23,4
Jésus dénonce l’attachement à une pureté toute extérieure : « Pharisien aveugle! Purifie d'abord l'intérieur de la coupe et de l'écuelle, afin que l'extérieur aussi devienne pur. Malheur à vous, scribes et Pharisiens hypocrites, qui ressemblez à des sépulcres blanchis : au-dehors ils ont belle apparence, mais au-dedans ils sont pleins d'ossements de morts et de toute pourriture; vous de même, au-dehors vous offrez aux yeux des hommes l'apparence de justes, mais au-dedans vous êtes pleins d'hypocrisie et d'iniquité. » (Mt.23,26-28) Or, c’est cette apparence que le pasteur veut préserver jusqu’au bout.
Avis partagés. Malgré nos réticences devant l’austérité du film, sa construction trop maîtrisée voire étouffante, ses qualités proprement cinématographiques (scénario, récit, lumières, construction, direction d’acteurs…) le recommandent. Guidés par l’instituteur, comme par la forme ouverte du film, on se sent invités à reprendre inlassablement une réflexion active sur le mal, éclairée par le respect et l’amour.
Charlotte
Une nouvelle page Cep 7ème ART
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REPRISE de Hervé Le Roux
Quel plaisir de réunir les noms de Michel Serrault, Ingmar Bergman et Michelangelo Antonioni ! Quelle tristesse que la cause en soit leur mort ! Une génération. Des grands. Que de moments intenses ils ont donné ! J’ai plongé dans le 7ème art avec « Le 7ème sceau » Je veux dire que c’est « Le 7éme sceau » qui a éveillé ma reconnaissance du cinéma comme un art. Dès lors, Ingmar Bergman m’accompagne, pas à pas, film à film.. Lassé, un temps, par ses plongées au plus obscur de la psyché, son terrible « Œuf du serpent » en 77 m’a empêché de goûter ses dernières œuvres jusqu’à ce 30 Juillet 2007 et sa mort à Faro, son île. Le collège des Bernardins lui consacrera l’un de ses Samedis Cinéma en février 2008. Michel Serrault fait partie de la famille. Dès cinq ans, j’accompagnai mes parents dans leurs sorties dominicales, assez souvent dans les cinémas du quartier pour voir : « Assassins et voleurs, Messieurs les ronds de cuir, La belle américaine, Bébert et l’omnibus, Des pissenlits par la racine »… autant de films qu’un cinéphile classe dans les séries B. Peu à peu on retenait son nom et puis il y a eu « Le viager » et « La cage aux folles » que je regarde encore avec émotion ; si, si : vous souvenez-vous du « Tu me trouves comique..? » murmuré à travers la porte à peine ouverte au début du second volet ? Un instant Molinaro, les éclairages, le maquillage et d’abord, le jeu de Serrault atteignent la puissane d’une photo de Nan Golding. Michelangelo Antonioni m’a ennuyé plus d’une fois… sauf quand « Blow up », à sa sortie en 67 annonce une nouvelle pratique de l’image inculturée dans le Londres des Beatles. Paradoxalement, il aura fallu « Par delà les nuages » tourné par Wim Wenders pour me donner le goût de replonger dans son œuvre et de découvrir ses Ecrits (coll. Inventeurs de formes, Images modernes, 2003) Merci messieurs ! Que le cinéma du 21ème siècle fasse fructifier ce que vous lui laissez en héritage. Michel Brière
Prochaines réunions :
Aumônerie "étudiants artistes" :
jeudi 5 mars 2009 20h au local
dîner partagé
Aumônerie des Beaux-Arts
tous les mardis
midi-14h
tous les jeudis 18h-20h
Salle 2A Bâtiment des Loges
14 rue Bonaparte 75006
Lecture de la Bible, "pas à pas avec Paul": les jeudis à 19h
Equipe Transition
Lundi 2 mars de midi à 15h.
déjeuner partagé